Objectifs partagés, motivation envolée ?

Depuis 2021, l’Entreprise cherche à réformer la gestion de la part variable, avec le passage d’objectifs individuels au Bonus Equipe et Bonus Groupe. L’Entreprise franchit une nouvelle étape en 2023, avec la transition vers les Objectifs Partagés, premier pilier parmi les cinq que comprend l’approche « People in Motion » portée par Jean-Claude Pats en Octobre 2022. Elle vise à apporter « plus de simplicité, d’agilité, de transparence, d’équité et d’alignement dans notre manière d’apprécier la performance individuelle et collective ».

Destiné à tous les employés (hors Forces de Ventes et Agents) et accessible via l’application Teams, un catalogue d’Objectifs Partagés liés aux priorités du Groupe a été constitué par les sponsors de chaque entité. Chacun pourra choisir avec son manager les objectifs les plus pertinents. Bien que la rédaction de ces objectifs ne soit pas encore finalisée, nous alertons la direction sur plusieurs points qui nous ont été remontés par les salariés :

• Sens et engagement : la plupart des salariés trouve raisonnable d’avoir un ou deux objectifs collectifs, mais pas cinq. Or, en parcourant la liste des objectifs, certains se sont sentis dépités. Même des managers, sous hiérarchie directe de sponsors, estiment impossible de trouver 5 objectifs pertinents. Comment garantir la motivation des employés lorsqu’ils n’ont pas de levier direct sur leurs objectifs ?
• Equité : ce système est présenté comme étant plus équitable, car il garantirait des objectifs d’un niveau d’exigence homogène, quand auparavant certains objectifs pouvaient être jugés trop complaisants. N’aurait-il pas mieux valu renforcer la formation des managers sur la qualification des objectifs ?
• Simplification : l’objectif affiché est de réduire le nombre d’objectifs dans les systèmes, et ainsi de simplifier -entre autres- la vie des managers. Au vu du catalogue, nous craignons que le temps gagné par les managers et managés en gestion d’objectifs individuels ne se dissipe en cherchan et en ajustant des objectifs pertinents.
• Légalité : certains employés ont un contrat de travail qui mentionne clairement que la première composante de leur rémunération variable est liée à la réalisation d’objectifs individuels. Or, peut-on qualifier ces Objectifs Partagés d’« individuels » ?
• Contexte : le résultat des NAO salaire est meilleur que l’an passé, même s’il reste en deçà de nos revendications. L’Entreprise semble faire profil bas en prévision de primes variables en forte baisse cette année. Ajoutons à cela l’inflation qui continue de nous impacter, et un contexte social national explosif : ces Objectifs Partagés sont vus par certains comme une mauvaise nouvelle de plus. Nous craignons une résignation de certains, entraînant un phénomène de « quiet quiting ».

Nous lancerons une grande enquête dès que le catalogue d’Objectifs Partagés sera finalisé, afin de recueillir vos retours d’expérience concrets.

Pour finir, nous nous questionnons sur les raisons qui motivent ce changement : en basant les rémunérations variables sur des indicateurs de performance plus macros, elle rend leur gestion plus prévisible. Or, un meilleur contrôle de la masse salariale contribue à mieux piloter la performance financière si chère à nos actionnaires, qui devraient encore bénéficier cette année d’une hausse substantielle de leurs dividendes, de l’ordre de 15% selon le consensus des analystes financiers.

Pourtant, lors de ses vœux à la presse ce 25 janvier 2023 à Paris, Florent Ménégaux déclarait : « Quand le travail est moins bien rémunéré que le capital, cela pose problème »*. Nous partageons ce constat, et sommes aux côtés de l’Entreprise pour adresser de manière constructive ce problème.

*Source : la Montagne, 26 janvier 2023, article de Patrick Campo

Charlotte Zuber, Représentante Syndicale au CSE Clermont.