Le Groupe a rappelé en avril son objectif de « tolérance zéro » face au harcèlement. L’intention de l’entreprise de protéger ses salariés est louable et bienvenue mais elle doit s’accompagner des ressources adaptées pour être véritablement efficace.
Les faits montrent une inflation des signalements sur la ligne éthique, y compris de manière anonyme. Nous y voyons le signe d’une parole qui se libère mais également quelques risques : comment éviter les situations de dénonciation abusive ? Nous accompagnons actuellement plusieurs salariés -souvent Managers- concernés par une enquête. Comment l’entreprise protège-t-elle les personnes visées du stress important que provoque l’ouverture d’une enquête les visant personnellement ?
L’entreprise dispose-t-elle des moyens suffisants pour mener à bien ce type d’enquête qui consiste à interroger des « témoins » pour rassembler des « faits », des « actes », des « paroles » … et à présenter les conclusions à un « Comité éthique » qui décidera de l’ouverture d’un processus disciplinaire (pouvant déboucher sur un licenciement) … A la clé il-y-a le soulagement ou le désespoir des victimes et la réputation ou la carrière d’un potentiel « harceleur ».
Un(e) PDP est-il (elle) suffisamment préparé(e) et compétent(e) pour prendre en charge tout le processus ?
L’entreprise sollicite aussi des enquêteurs internes (DCSE) ; comment sont traitées les données relevées ? Leurs recommandations sont-elles suivies ? Il serait catastrophique que le doute s’instaure et que l’entreprise soit soupçonnée de « chasse aux sorcières » en profitant de l’ouverture d’enquêtes éthiques.
L’impact sur les managers pourrait aller beaucoup plus loin : à voir des collègues dénoncés pour des faits remontant parfois à plusieurs années, quel manager peut encore se sentir à l’aise lorsqu’il devra expliquer à un équipier qu’il ne remplit pas les attendus de son poste ? La CFE-CGC y voit un risque de démotivation des managers, voire de crise des vocations.
L’autre revers concerne les salariés déboutés ou découragés dans leurs accusations de harcèlement qui ne se relèveront jamais ou très difficilement de l’expérience traumatique, renforcée par le « non-lieu » de l’enquête alors qu’ils ont osé prendre la parole et dénoncer les faits dont ils sont victimes. L’entreprise met en place cette démarche dans une bonne intention mais pêche dans son exécution.
La CFE-CGC accompagne tous les salariés. Nous les écoutons et, avant de « déposer sur la ligne éthique », nous recherchons d’autres moyens de dialogue préalables. Le mot « harcèlement » ne doit pas être mal interprété.
Quelle que soit votre position dans l’entreprise, si vous êtes concerné par une situation problématique, prenez contact, le plus en amont possible, avec vos élus CFE-CGC qui vous aideront à objectiver la situation, que ce soit pour vous accompagner dans une démarche de saisie de la ligne éthique ou si vous êtes l’objet d’une enquête. Vous trouverez de l’aide et du soutien avant, pendant et après cette période difficile émotionnellement.
Nous invitons l’entreprise à beaucoup de prudence, de transparence et d’objectivité… Nous réitérons notre suggestion d’inclure un ou plusieurs représentants du personnel dans le Comité éthique. La CFE-CGC rappelle que sur ce sujet, l’entreprise n’a pas le droit à l’erreur et que « faire justice » nécessite beaucoup d’objectivité et de professionnalisme, pour ne pas se voir elle-même accusée de… harcèlement.
Les Délégués Syndicaux CFE-CGC, le 6 juillet 2021